Prix Goncourt  2021 : un devoir de mémoire pour Yambo Ouologuem ?    


À 31 ans, le Sénégalais Mohamed Mbougar Sarr devient le premier auteur d’Afrique subsaharienne à remporter le prix Goncourt, considéré comme le plus prestigieux des prix littéraires français avec son livre La plus secrète mémoire des hommes. Au milieu de l’euphorie que suscite son sacre, se trouve un vibrant hommage à l’écrivain malien Yambo Ouologuem.

Sacré Goncourt 2021, La plus secrète mémoire des hommes du Sénégalais Mohamed Mbougar Sarr, coédité par Philippe Rey (France) et Jimsaan (Sénégal), honore la mémoire de l’iconoclaste écrivain malien Yambo Ouloguem, un nom que l’histoire de la littérature retiendra à jamais.

En effet, en 1968, Yambo Ouologuem, alors âgé seulement de 28 ans, remportait le prix Renaudot avec son premier roman intitulé Le devoir de violence. Yambo devenait ainsi le premier écrivain africain à décrocher cette distinction littéraire. Mais Le devoir de violence fera, à lui seul, la gloire et la chute de son auteur accusé de plagiat à la suite de son sacre. Après de vaines tentatives pour réhabiliter son honneur, Yambo Ouologuem retourne au Mali où il décède en octobre 2017 à Sévare, sa ville natale.

Le livre de Mohamed Mbougar Sarr se dresse comme un vibrant hommage à l’auteur malien. L’histoire de La plus secrète mémoire des hommes s’est en effet « inspirée de l’aventure tragique de Yambo Ouologuem ». La trame du livre raconte l’histoire d’un certain Diégane Latyr Faye, un jeune écrivain sénégalais installé à Paris qui a été bouleversé par la découverte d’un livre paru en 1938. Il décide alors d’enquêter sur l’histoire qui se cache derrière ce roman. Une quête qui va le conduire sur les traces de son auteur, Elimane, le personnage fictif de Yambo Ouologuem.   

L’auteur de Le devoir de violence avait été accusé, à l’époque, d’avoir emprunté des passages d’autres auteurs tels que Graham Greene et André Schwartz-Bart. Mais avant cet hommage de Mohamed Mbougar Sarr, Yambo avait reçu des soutiens au moment des faits : « J’ai toujours vu mes livres comme des pommiers, content qu’on mange de mes pommes et content qu’on en prenne une, à l’occasion, pour la planter dans un autre sol. À plus forte raison suis-je profondément touché, bouleversé même qu’un écrivain noir ait pu prendre appui sur Le dernier des justes pour faire un livre tel que Le devoir de violence. Ainsi donc, Monsieur Ouologuem n’est pas mon débiteur, mais moi le sien », avait dit André Scharz-Bart, lauréat du prix Goncourt en 1959, à qui il avait pourtant emprunté de nombreux passages.

« L’attribution du prix Goncourt à Mohamed Mbougar Sarr revêt une double portée symbolique. C’est, en effet, un jeune talent africain qui dédie son livre à une des figures les plus contrastées de l’histoire littéraire francophone, pour que cela serve de stimulant aux nouvelles générations : Yambo Ouologuem », nous explique Mamadou Bani Diallo, professeur de lettres et critique littéraire malien, selon qui cette dédicace du jeune récipiendaire sonne comme une renaissance pour Yambo Ouologuem.

Youssouf Koné

 

 

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